Brillant comme une larme - Jessica L. Nelson

Lycéenne, j'avais été fascinée par  "le diable au corsp" et  "Le bal du comte d'Orgel", lectures sulfureuses lorsqu'on croit au mythe du prince charmant. Jessica L. Nelson, dans "Brillant comme une larme" publié chez Albin Michel, fait revivre une époque culturelle et artistique, celle de l'immédiat après-guerre de 1914-1918, au fil d'un portrait tout en finese d'un personnage dont le nom, Raymond Radiguet, un siècle après sa mort, résonne encore comme une légende. J'ai plongé avec bonheur parmi ces fantômes qui traversent mon univers littéraire et artistique : Picasso, Breton, Aragon, Max Jacob, Coco Chanel et surtout Jean Cocteau. J'ai tourné les pages dans un ravissement constant, plongeant avec délices dans les tourments sensuels d'un adolescent pressé de vivre les passions charnelles et intellectuelles, persuadé qu'il avait de grandes choses à accomplir et peu de temps pour y parvenir. Raymond Radiguet "va tutoyer les étoiles et s'y brûler".  Sa flamme ne quittera jamais Jean Cocteau qui lui rendra justice et écrira inspiré :"Le vrai tombeau des morts, c'est le coeur des vivants".

Extrait : ... Apostrophé par Valentin, Raymond sursaute. Il finit par en avoir l'habitude mais goûte peu la variété des surnoms dont on l'affuble. Petit Monsieur. Monsieur Bébé. Radigo. A ce moment précis de sa vie, il est perdu entre ce qu'il aimerait écrire - ce n'est pas parce que Le Diable au corps a été publié qu'il se repose ! - et ce qu'il parvient à coucher sur le papier quand il s'assagit ou qu'on le fait s'assagir. Entre les deux, il y a un monde. L'exceptionnel et sinueux vallon entre les seins appétissants de Valentine, enserrés dans un bustier qui révèle plus qu'il ne recouvre, le rend songeur. Hugo feint de ne rien voir, Georges s'en moque, Cocteau lève les yeux au ciel. Le gamin est incorrigible. La littérature ou les femmes, il n'y a que ça qui l'intéresse. C'est si difficile à accepter pour Jean, même si celui-ci prétend mieux faire l'amitié que l'amour !

Belle lecture à tous ...