Le silence selon Manon - Benjamin Fogel

Je vais vous présenter aujourd'hui "Le silence selon Manon" de Benjamin Fogel, publié chez Payot-Rivages dan la collection RIVAGES/Noir.

Quatrième de couverture : Le harcèlement en ligne a pris de telles proportions que la police y consacre de plus en plus de moyens. Le commissaire Sébastien Mille, spécoaliste de ces questions, s’intéresse de près aux manœuvres des masculinistes qui se réunissent sur des forums où ils déversent leur haine des femmes. À Paris, les musiciens de Significant Youth sont agressés lors d’un concert par une poignée d’incels, ces célibataires involontaires qui détestent les valeurs humanistes et féministes défendues par le groupe. Cet épisode n’est que le prélude à un attentat beaucoup plus violent qui va bouleverser la vie du leader Yvan, de son frère Simon et de leur entourage. Il faudra à Sébastien Mille une obstination hors du commun pour identifier les coupables, d'autant plus insaisissables qu'ils savent être furtifs ...

Mon commentaire : En reprenant des thèmes qui défraient tristement l'actualité, l'auteur évite adroitement tout manichéisme. Il décrit les thèmes favoris des dérives internet : anonymat, cyberharcèlement, féminisme, écologie, réseaux sociaux, meutes virtuelles, extrémismes ...  Liberté de s'exprimer ? Pour en faire quoi ? MyFrenchRéseau ( avatar de Facebook ), lieu d'expression de toutes les frustrations, pose la question de l'hégémonie des réseaux :

"Nous ne pouvons pas laisser le centre névralgique de nos relations sociales, mais aussi progressivement de notre identité totale, aux mains d’une entreprise privée. Si les réseaux sociaux vont continuer à dévorer notre existence, au point de faire de notre vie en ligne une interface entre nous et le monde, il faut se poser la question de la place de l’État et permettre aux citoyens et citoyennes d’avoir un poids dans les décisions prises sur le sujet.” Benjamin Fogel dans "Milieu hostile" blog de Christophe Dupuis

Que voulons nous confier à la manchine ?

" ... notre identité numérique est le point d’entrée des traces que nous laisserons sur Terre. Quand nos proches nous auront oubliés, il ne restera un jour de notre passage sur terre que nos traces numériques. C’est donc une vraie question de réfléchir à la partie de nous-mêmes que nous souhaitons confier aux machines.” Benjamin Fogel dans "Milieu hostile" blog de Christophe Dupuis

Les frontières sont troubles, effacées, confondues entre hommes et femmes qui sont dans l'incapacité de trouver leur place face à l'autre : le miroir est brouillé, les codes sont déconstruits, rendant les personnages encore plus complexes.

L'écriture est rapide, fine, maitrisée, subtile, dans le mouvement, oscillant entre virtuel et réalité. Ce texte reprend les codes du roman noir et de l'anticipation, alliant la critique sociale et le thriller psychologique, dans une terrible confrontation entre l'intime et le politique.

Dans cet incessant mouvement bruyant et abrutissant, le seul espoir de rédemption sera le silence final, épuré des scories accouphènes ...

Belle lecture à tous ...